Diagne Chanel

Diagne Chanel

Une artiste engagée

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À travers des expositions dans des musées internationaux, la publication de 2 livres pour enfants avec Paris-Musées et un essai « Est-ce que ton pipi est noir ? », Diagne Chanel a développé ces 20 dernières années différents thèmes interculturels sur la société française. 

For the past 10 years, Diagne Chanel has been developping intercultural themes undergoing through french society. Including exhibitions in several major international museum and published 2 children’s books with Paris-Musées and an essay « Est-ce que ton pipi est noir? ».

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Miroirs Mortels

Conférence Black Portraiture[s], Paris, Janvier 2013

Ces Miroirs Mortels débutent par « Le Garçon de Venise », de 1976, qui fut ma première toile où surgit soudain un homme noir. Portrait imaginaire d’un jeune homme du Congo, qui étudiait avec moi à l’École des Arts décoratifs, rue d’Ulm, à Paris. Cette toile a instantanément soulevé beaucoup de questions et de perplexité. Dans les années 70, on me fit vite comprendre qu’il serait simplement impossible d’exposer et de vendre des tableaux représentant des Noirs.

La représentation du corps Noir a toujours posé un problème, j’ai relié cette représentation à leur histoire souvent violente. La Nuit du Boxeur, portrait de Battling Siki, premier Africain ‘poids lourd‘ champion du monde de boxe contre Georges Carpentier à Paris en 1922, assassiné à New York en 1925, ouvre une longue période de 27 ans d’un travail engagé. Cette série de 15 toiles, initiée en 1985, retrace les vies des boxeurs noirs, souvent traversées de durs combats politiques en Angleterre, aux États-Unis et même en France où Battling Siki, alias Louis Mbarick Fall, fut un vétéran de la 1ère Guerre Mondiale.

Il disait : « Beaucoup de journalistes ont écrit que j’avais un style issu de la jungle, que j’étais un chimpanzé à qui on avait appris à porter des gants. Ce genre de commentaires me fait mal. J’ai toujours vécu dans de grandes villes. Je n’ai jamais vu la jungle ». Il était né dans la capitale de l’Afrique Occidentale Française, à Saint-Louis du Sénégal, en 1897.

J’ai travaillé sur les représentations de ces corps noirs, leur force contrainte à l’héroïsme; sur les stéréotypes fabriqués pour la domination, sur le mouvement fluide et l’espace clos du ring (microcosme du cirque), le face-à-face et la confrontation, en simulacre. Et « Panama Al Brown », écrivait son ami Jean Cocteau, « est pareil à la foudre, à la chance, à la colère, à la grêle, à la couleuvre, aux épidémies »; cet autre boxeur disait de lui-même: « ma droite tire à balles blindées, je la réserve pour les grands fauves ! ».

Mon travail en peinture se construit le plus souvent autour d’un personnage, inscrit dans un dispositif de « Renaissance italienne » et souvent campé sur un dallage -trois éléments constituant un découpage simultané de l’espace et du temps. Je m’intéresse particulièrement aux boxeurs dans cet espace limité du ring, comme une scène de théâtre, et leur évolution circonscrite au cœur de cet espace, pour réunir les trois dimensions de la tragédie. Unité de temps, de lieu et d’action qui me permet, dans mon univers parallèle, de recouvrer l’éternité de l’instant, quête essentielle de la recherche.

  • Cette série et celles qui suivront, dévoilent ou consignent des histoires et quelques tragédies :
    Les séries « Bébés cruels » & « Poung Zulus », relient les violences de l’enfance, à l’Afrique du Sud de l’Apartheid.
  • « La fin d’un primitif «  d’une altérité sacrifiée dans une furie meurtrière, d’un jeu de miroirs encore, et du drame d’une double contrainte éternelle…
  • « Une Saison au Sud Soudan », rappelle le génocide des populations noires du Soudan, où les corps sont émasculés, suppliciés, et mutilés depuis la séculaire traite transsaharienne jusqu’aux nettoyages ethniques du 20ème siècle.
  • « Pas de Printemps pour Geronimo », relie le génocide des Amérindiens à la guerre d’extermination du Soudan.
  • « Fruits étranges pour John Garang » remémore le lynchage et les combats antiesclavagistes, toujours d’actualité en Mauritanie (où trois fois on a abolit l’esclavage depuis les années 80) et au Soudan. C’est également un rappel du texte de la chanson de Billie Holiday. John Garang a lutté durant plus de 20 ans contre la dictature de Khartoum. Son décès, survenu trois semaines après son investiture, a donné une dimension prémonitoire tragique à cette série.
  • « Pourquoi Mourir sous un Ciel plein d’Étoiles ? » évoque les bombardements de civils au Darfour, mais aussi dans le Nil Bleu et le Sud Kordofan, aujourd’hui encore.
  • « Miroir mortels », dénonce la lapidation des femmes sur le terrain de l’archaïsme.
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Boxeurs noirs, une histoire meutrière
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L'atelier avec Sainte métisse
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L'atelier sous les manguiers

L’installation « Sanctuaires/ Sépultures » enfin, veut rendre hommage aux centaines de milliers de jeunes hommes africains qui, déportés par l’esclavage transsaharien, sont morts durant cette inhumaine traversée du désert libyen, sur la Route de Teggery. Là où le corps noir disparaît. Ceux qui arrivaient vivants au bout du voyage, devenaient des eunuques dans les harems du Moyen-Orient. Et Samuel Cotton écrivait en 1998, dans La Terreur silencieuse. Un voyage dans l’esclavage africain contemporain : « Cette route était jonchée, balisée de tant d’ossements humains qu’un voyageur, même peu familier de cette région désertique, aurait presque pu trouver son chemin grâce à eux… ».

À son terme, cette recherche propose de mettre en place une installation-sanctuaire, dans ce désert de Teggery, afin de rendre un jour une sépulture à ces morts jamais ensevelis, totalement gommés et oubliés de l’Histoire.

Ces Fatals Mirrors s’achèvent par Métis dans les Villes, déambulation initiée en 2005 qui s’attache à travers un travail photographique, des récits familiaux, des toiles, des vidéos et installations, aux allers-retours, à la présence et à l’invisibilité des Métis dans les mégapoles d’Occident ou d’Afrique.

Bébés cruels, Lutteurs, Le Rêve Vénitien, mettent en scène, à différentes époques des personnages aux destinées sereines ou structurées, confuses ou fragmentées, qui questionnent toujours les corps.

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