… C’est surtout le regard des autres sur mes photographies, celui des photographes, des commissaires d’expositions, qui m’a fait explorer, développer ma vision sur cet aspect de mon travail.
Pour moi c’était un simple outil de recherche et j’avais un certain mépris pour cette technique. Je comprenais la phrase de Baudelaire.
J’ai finalement trouvé que c’était une manière plus contemporaine et adaptée, pour travailler autour de mon sujet, Métis dans les Villes.
Le médium photographique m’a permis d’élargir mon champ artistique, en y ajoutant une liberté.
En utilisant la photographie, je me défaisais de la matière et mon travail devenait, essentiellement, la représentation d’une construction intellectuelle.
Le temps existe de deux façons avec la photographie, ce qui est très intéressant, et qu’on perçoit encore mieux avec la photographie numérique. D’abord la photographie peut figer le temps. Avec la photo numérique et les nombres de fichiers stockés dans un ordinateur, on réalise que le temps est multiple, rempli de plusieurs milliers d’autres temps qui sont eux-mêmes, issus d’un temps qui est révolu. Il est très frappant de le constater, on dit que le temps passe trop vite, mais quand on regarde toutes ces photographies finalement, le temps ne passe pas.
Cette boite aux lettres dans un foyer de femmes et d’enfants à Johannesburg m ‘a fendu le cœur. Toutes ces lettres où le temps emprisonné n’a jamais été distribué…
Cela m’a fait penser à ces jeunes résistants ou déserteurs de l’armée française, dont les lettres écrites à leur mère, avant leur exécution, ne furent jamais distribuées ; Elles furent retrouvées des années après la fin de la dernière guerre mondiale.